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Matière(s) à écrire
12 octobre 2012

Ce que le milieu médiatique fait aux cerveaux (Bruno Harlé, 2012)

Harlé Bruno, 2012. Ce que le milieu médiatique fait aux cerveaux. Séminaire préparatoire aux Entretiens du Nouveau Monde Industriel, ENSCI-Les Ateliers, Paris, 28 mars 2012

Marshall McLuhan, théoricien canadien des médias – Understanding media, 1964

« Nous donnons forme à nos outils, après quoi ce sont eux qui nous donnent forme » : les neurosciences confirment aujourd’hui cette affirmation.

Dans cette intervention, Bruno Harlé questionne les liens qu'entretiennent les processus cognitifs et les nouvelles technologies : qu’est-ce que les nouvelles technologies étendent ou rendent obsolètes dans les domaines de la lecture-écriture, de l’attention, du raisonnement et des apprentissages ? Ces différentes entrées révèlent :

  • l'importance du geste dans les processus d'apprentissage ;
  • le déficit d'attention provoqué par l'écran ;
  • le rôle de l'effort cognitif et de l'implication dans le développement des compétences ;
  • l'influence néfaste de la surcharge d'informations dans les processus de mémorisation.
Notes de lecture 

La question de l'écriture

Le clavier étend la main dans sa fonction de communication – comme le stylo, c’est un média. Mais il rend obsolète le geste graphique. Travail de Marieke Longcamp et Jean-Luc Velay sur la question du graphisme et de son rôle dans l’apprentissage de la lecture et de l’écriture : on active les zones motrices du cerveau non seulement dans les activités d’écriture, mais aussi dans les activités de lecture de lettres. Cela étant, la stabilité de l’apprentissage des lettres est bien meilleure quand elle se fait par le geste : les informations gestuelles sont stockées lors de l’apprentissage et peuvent être remobilisées ultérieurement.

La question de l'attention

L’écran lumineux est utilisé dès le XIXe siècle pour attirer l’attention des gens. La télévision décuple cette capacité en ajoutant de la dynamique. Ces écrans orientent l’attention des gens – on parle d’orientation d’attention (cela s’oppose à l’attention volontaire qu’une personne porte à un objet). L’écran rendrait ainsi obsolète la capacité d’attention volontaire des individus.

Référence : Neil Postman, Se distraire à en mourir – « La télévision enseigne le mieux à regarder la télévision. »

La question du raisonnement

Aujourd’hui, les ordinateurs mettent à disposition de chacun des forces de calcul incroyables, avec de nombreuses aides, des menus déroulants, etc. et les déchargent ainsi des efforts cognitifs. Si l’on compare deux versions d’un même logiciel avec des niveaux d’aide différents, on se rend compte que l’appropriation du logiciel le plus documenté est plus rapide, mais avec ce logiciel, les performances plafonnent et la stabilité de l’apprentissage est bien moindre qu’avec l’autre version du logiciel (exemple typique de l’enfant qui croit savoir jouer aux échecs en utilisant un logiciel qui suggère les déplacements des pièces). En bref, plus l’utilisateur est impliqué, plus il développe ses compétences.

La question de la cognition

« Plus le contenu est riche, plus on fait plaisir au public »... néanmoins, en associant les modalités, on diminue la rétention d’information de par la surcharge d’informations. De la même manière, il est prouvé que l’on retient moins d’un texte augmenté d’hypertextes que d’un texte papier.

Exemple du jeu Nintendo « professeur Kawashima » : du point de vue cognitif, il est prouvé que le jeu est à peu près équivalent au jeu papier-crayon de Pif Gadget.

De nombreuses études montrent que la présence d’un ordinateur à la maison a tendance à détériorer les performances scolaires (au point que certains établissements aux États-Unis ont abandonné leur programme d’éducation par le numérique) – a contrario, l’implication des parents dans l’accompagnement scolaire des enfants a un effet positif sur leur performance, indépendamment du niveau des parents.

Conclusion

« Ce n’est pas parce qu’un média est nouveau et technologique, archi-sophistiqué, hyper complexe, qu’il a une valeur ajoutée en tant que tel pour le développement cognitif et l’éducation. » Par ailleurs, il ne faut pas extrapoler les effets observés d’un nouveau média chez l’adulte (qui dispose déjà de certaines capacités) chez l’enfant pour qui les compétences sont encore à développer. Les neurosciences soulignent l’importance de l’effort cognitif.

Marshall McLuhan : « C’est le moment d’étudier les nouveaux médias et leurs effets. Quand ils seront omniprésents, ce sera plus difficile. [...] Nous ne savons pas qui a découvert l’eau, mais nous savons que ce n’était pas un poisson. »

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