IMAGES DE LA PLATEFORME
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"Dicotron" est une expérimentation pédagogique et ludique sur la génération automatique de mots.
En s'appuyant sur une liste de préfixes et de suffixes de la langue française (souvent issus du grec et du latin), le script forme aléatoirement un mot et en précise le sens des racines.
Certains des mots générés aléatoirement existent déjà dans la langue française... mais beaucoup d'entre eux sont spécifiques à des domaines scientifiques et donc très peu employés dans le langage courant.
préfixe
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suffixe
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étymologie
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À votre tour, générez de nouveaux mots en cliquant sur les racines du mot proposé par le Dicotron.
Amusez-vous à poster en commentaire les définitions de ces mots imaginaires !
Pour commencer, voici quelques exemples :
Voir aussi : Questionner [1] - Le texte comme amorce d'une requête /// expérimentation sur la manière dont les suggestions des robots canalisent les recherches vers les domaines les plus populaires (télé-réalité, sport, religion, sexe...) et privent l'internaute de toute veilléité de curiosité ou d'égarement
L'écriture comme révélateur de tendances :
les internautes confient aux moteurs de recherche leurs préoccupations du moment sous la forme de quelques mots-clés. Google Correlate offre aux utilisateurs de pouvoir fouiller les données de recherche par zone géographique et par période.
Mois par mois, au fil des années, le cycle des requêtes formulées par les Français révèle des centres d'intérêt gravitant autour :
Il est intéressant de noter que, contrairement aux suggestions de recherche qui orientent l'internaute vers des thèmes très télévisuels, la périodicité révèle des préoccupations beaucoup plus ancrées dans l'événement collectif et festif.
L'outil Google Trends permet de calculer les volumes de recherche associés à une requête par période et par zone géographique. Dans l'exemple ci-dessous, j'ai testé la requête "vendanges" sur la France. Outre la courbe de fréquence (qui montre une activité récurrente de la requête à l'automne), la cartographie montre que la requête est plus populaire dans les régions viticoles. Enfin, l'outil liste les requêtes dont les volumes coïncident (cela signifie que les courbes temporelles de ces requêtes sont proches de celle observée pour "vendanges", mais pas forcément que ces requêtes sont conjointes à la requête "vendanges", c'est-à-dire émises par les mêmes internautes et dans la même intention).
Dans le prolongement de Google Trends, Google Correlate propose une analyse détaillée des co-occurrences entre les requêtes. Les requêtes sont analysées selon l'une de ces trois modalités :
L'internaute choisit une modalité et entre une requête : Google Correlate liste alors les requêtes dont les volumes sont les plus proches de la requête soumise (co-occurrences pour chacune des semaines / chacun des mois / chacun des états en fonction de la modalité choisie). Les résultats obtenus pour la requête "vendanges" (volumes mensuels observés en France) donne les résultats suivants :
La modalité choisie est temporelle : de fait, les requêtes co-occurrentes à la requête "vendanges" correspondent aux requêtes effectuées par les internautes à la même saison que les vendanges (inscriptions à la rentrée, ouverture de la chasse, festivals, etc.)
L'outil ne dévoile en rien le fondement des liens entre les différentes requêtes (pourquoi telle requête est-elle co-occurrente de telle autre ? sont-ce les même internautes qui produisent ces requêtes ? quels autres critères que la saison pourraient expliquer les liens observés ?) Pour autant, Google Correlate ancre la requête dans une temporalité et une spatialité qui encouragent la fouille de données et les associations (voir expérimentation Questionner [2] - Tendances de recherches et associations textuelles).
Alain Giffard aborde la question de l’attention du lecteur et de son évolution dans le contexte de la lecture sur écran.
La logique des lectures dites « industrielles » (en référence à la production des lectures automatisées par les robots et à leur industrialisation par les plateformes en ligne) crée un « conflit des attentions » qu'Alain Giffard explique ici par un conflit des cultures.
La période actuelle est marquée par une transition culturelle, mettant le lecteur aux prises avec des chaînes d’attention contradictoires :
Alain Giffard prend comme point de départ les références suivantes :
Il y a un problème d’attention lorsqu’il y a un conflit des attentions, il y a un conflit des attentions lorsqu’il y a un conflit des cultures.
= conflit entre la culture chrétienne et la culture antique
Cassien décrit la situation d’un jeune moine novice qui n’arrive pas à prier à cause d’images de la culture païenne (Ovide, le « grand tentateur »).
La tentation vient de la cultura : ce n’est pas seulement la culture officielle de Rome, c’est aussi le « petit culte familial », là où le culte et la culture se rejoignent (culte dont le paterfamilias est le prêtre).
→ on cultive les arts et les lettres, dans l’idée de se cultiver soi-même
Métaphore de la chaîne : au-delà du conflit de représentations (risque de zapper d’un espace de représentation à un autre), il y a un conflit de normes : on passe d’un espace normé à un autre espace normé. Le mot « distraere », étymologie latine de « distraire », signifie d’ailleurs « délocaliser » d’un point de vue juridique.
→ la proximité du thème de l’enchaînement avec celui de l’attention est central
Il y a domination, maîtrise dans l’attention : « il faut savoir vivre avec ses chaînes » (Nietzsche). Se désenchaîner, c’est quitter un espace de représentation, mais aussi un espace normatif, c’est-à-dire un format des manières d’être attentif pour un autre.
Différentes propositions ont été faites aux premiers siècles du christianisme pour résoudre ce conflit
Proposition de Saint Augustin : il fait une innovation qui consiste à s’appuyer sur une certaine théorie littéraire pour proposer une certaine conception de l’association de la lecture, de la méditation et de la mémoire.
Le lecteur chrétien dilate le temps (du récit temporel) de sa lecture, par analogie avec la dilatation temporelle qui se produit par l’incarnation de Jésus (l’éternité faite homme). La lecture, la méditation, la concentration sont des « techniques de soi » qui sont discrétisées, séparées les unes des autres.
L’innovation fondamentale de Saint Augustin consiste à placer la méditation au cœur du processus de la lecture et à la placer comme finalité de la lecture : cette proposition provoque la dilatation du temps de conscience. En lisant, on se transforme soi-même et on transforme la mémoire → ce que le lecteur « garde » forme sa conscience de lecteur.
La méditation est le mot latin qui traduit « la veille, l’exercice » → sur « veiller, surveiller », on renvoie au soin de soi, au souci de soi, mais aussi à l’attention, au fait de faire attention. Prendre soin de soi, c’est faire attention à ce qu’on dit et ce qu’on pense (surveillance de soi).
Les confessions de Saint Augustin sont une autobiographie de lecteur, elles mettent en scène un lecteur qui pratique la lecture comme technique de soi, comme pratique de soi.
Saint Augustin est frappé par Ambroise qui pratique la lecture silencieuse.
Par ailleurs, l’objectif de Saint Augustin est de retourner les armes des païens contre eux-mêmes.
→ une certaine technologie de contrôle de l’attention doit être utilisée pour passer d’une culture à une autre
À Herbert Simon (prix Nobel d’économie) est posée la question : comment aurait-on pu faire, quelles informations aurait-on dû donner à Johnson pour que les Américains ne perdent pas la guerre du Vietnam ? À cela il répond : il y a une surcharge d’informations – au point qu’elles en perdent leur valeur → l’information consomme une ressource qui est l’attention.
Selon Simon, il faut développer des dispositifs attentionnels pour faire le tri, pour retraiter cette information. L’idée d’économie de l’attention est implicite dans ce positionnement.
L’économie de l’attention n’est pas la situation dans laquelle l’information et la culture sont les produits d’appel pour le marketing et pour la consommation en général. En revanche, l’économie de l’attention correspond à une situation dans laquelle une information est diffusée, le destinataire met en place un dispositif pour trier cette information, un opérateur intervient pour aider ce destinataire (moteur de recherche ou de recommandations) : ayant classé ce service, cet opérateur revend à un tiers (généralement le marketing) l’attention ou la connaissance de l’attention qu’il a du destinataire → idée de faire glisser les gens d’un domaine à un autre (exemple : Google, Amazon, Apple).
Par rapport à l’économie de l’attention, comment se situe la lecture numérique ?
Les lectures industrielles reposent sur la notion d’industrialisation des lectures, i.e. lorsqu’il y a production de lectures automatisées (ex. : robot de Google) et lorsqu’elles conduisent à l’industrialisation des lectures humaines (revente des lectures et des lecteurs selon le modèle de l’économie de plateformes). L’objectif de ces industries de lecture est bien de détourner le lecteur de sa lecture, et même l’acte de lecture de sa pratique pour autant qu’elle constitue une subjectivité du lecteur.
→ la surcharge cognitive dans la lecture numérique rend difficiles l’association lecture-réflexion, le triangle lecture-réflexion-mémoire et la lecture comme technique et comme pratique de soi (association réflexion-lecture pointée par Nicholas Carr).
Autour de la question des jeunes lecteurs – et à partir de la baisse réelle de leurs performances de lecture – se développe une « forme de malédiction » : on dit du mal des jeunes. Comme dit Maggie Jackson, les jeunes sont « distracted », c’est-à-dire distraits, mais au-delà, ils sont « fêlés ».
Y a-t-il dichotomie entre être attentif et être distrait ? En fait, il y a conflit entre la culture classique (et celle du livre imprimé) et la culture industrielle (et celle du numérique, de la télévision). Ce conflit se manifeste par un conflit des attentions, peut-être représentatif de cette période de transition = difficulté à vivre parmi les différentes chaînes d’attention. Le lecteur est tiraillé :
Expérience menée par Alexandra Saemmer (Université de Saint-Denis) a demandé à des étudiants de lire des journaux en ligne (avec liens hypertextuels) et de dire, pour chacun des liens hypertexte, de dire :
La première question montre qu’il y a une communauté de lecteurs : tous s’attendent à la même chose (autrement dit que l’espace soit normé de la même manière). En pratique, il y a incompréhension entre lecteurs et rédacteurs (les liens ne correspondent pas à ce à quoi ils s’attendaient)... et les lecteurs sont mécontents.
→ conflit des attentions, i.e. entre une attention (vécue comme) orientée texte et une attention orientée média : dans cet exemple, la surcharge cognitive est d’autant plus grande que les inférences du lecteur sur le lien hypertextuel sont compliquées par le détournement normatif de la technologie hypertextuelle (en gros, le journaliste exploite le lien hypertextuel à sa guise, alors que le lecteur en attend un usage normé... d’où la surcharge cognitive qui exacerbe le conflit des attentions).
De par son statut public, le nom d'une borne wi-fi devient un espace d'expression. Compte tenu de la faible portée des réseaux, les libellés que certains particuliers choisissent sont rédigés à l'intention de leur voisinage. Contrairement à des espaces d'expression tels que les blogs ou les fils Tweeter, l'information est ici (partiellement) anonyme et n'exige pas de l'internaute d'aller intentionnellement sur un site pour y accéder.
Ce procédé est à rapprocher du billet scotché dans le hall d'immeuble ou dans la cage d'escalier. Il est une forme d'appropriation d'un espace public dans lequel l'auteur balance entre contenus explicites et implicites, signés et anonymes.
En 1998, l'artiste britannique Heath Bunting se met en scène dans un article de James Flint, journaliste fictif au Telegraph. Le récit retrace la biographie de Bunting, à la manière d'un CV détaillé, dans lequel chaque mot renvoie à un site dont l'URL est construite à partir de ce mot. L'artiste se distancie doublement de son œuvre, d'une part en parlant de lui à la troisième personne par l'entremise d'un personnage fictif, d'autre part en démultipliant le texte en autant de pages qu'il y a de mots.
Au-delà de cette construction textuelle et de sa fragmentation hypertextuelle, les contenus associés ne sont pas du fait de l'auteur et posent la question de la paternité de l'œuvre et, plus généralement, des mécanismes d'appropriation liés à l'écriture numérique.
Victor Petit évoque les expérimentations qu'il a menées en classes de collège autour de l'écriture numérique et de sa portée dans les processus d'apprentissage.
L'écriture numérique dépasse les schémas traditionnels en ce sens qu'elle n'est plus seulement le pendant du langage (outil de retranscription du langage) mais le révélateur du milieu technique (écriture comme finalité, comme information en soi).
Dans ces expérimentations, l'utilisation d'outils d'écriture collaborative (de type Etherpad) permet aux élèves de prendre conscience des spécificités de l'écriture numérique et, en filigrane, de mener une réflexion sur l'environnement numérique (information, communication, collaboration, etc.)
Deux attitudes très fortement opposées à propos de la lecture numérique à l’école :
Concept de la culture technique : pourquoi introduire la question de l’écriture numérique dans les cours de lettres au collège ? → la pratique de l’écriture numérique permet des allers-retours entre lecture et écriture – il s’agit de :
Le milieu Internet est invisible comme tel : « l’homme ne voit pas son milieu technique : il voit avec ou selon lui » (la technique est caractérisée par son oubli). La culture technique intervient justement pour rendre visible le milieu, lui rendre son épaisseur, lutter contre l’illusion d’immédiateté. La médiation révèle, elle fait comprendre la spécificité de tel ou tel algorithme (en l’occurrence l’algorithme de Google).
L’écriture numérique donne à penser et à réfléchir autour du numérique. Le milieu n’est pas un moyen : Internet n’est pas un moyen pour diffuser de l’information, c’est aussi la fin, c’est-à-dire l’information technique et sociale elle-même.
Traditionnellement, l’enseignement du numérique à l’école ambitionne de former aux usages, à la pratique : ce positionnement repose sur l’idée selon laquelle la fracture numérique est due à des inégalités d’infrastructure et d’équipement. Pourtant, la plupart des collégiens auxquels on s’adresse connaissent très bien l’outil numérique – en revanche, ils n’ont pas forcément la culture du numérique. Un collégien qui blogue ou qui tweete est un « alphabétisé » du numérique, mais il n’est pas pour autant un « lettré du numérique » en ce sens qu’il ne comprend pas le statut de la lettre numérique, le statut de la trace de l’écriture.
→ travail autour, non pas de la distinction alphabète-analphabète, mais de la distinction alphabète-lettré
Aborder le numérique à travers la notion d’écriture = comprendre pourquoi l’écriture est informée par la technique et pourquoi les dispositifs techniques sont informés par l’écriture. Travail de réflexion autour des spécificités de l’écriture numérique pour faire réfléchir au numérique lui-même.
→ réalisée avec le logiciel libre Etherpad d’écriture interactive et collaborative.
Une page de traitement texte avec une fonction chat, sur laquelle on peut écrire à plusieurs, en synchronisés, avec des codes couleurs de sorte que l’on sait qui écrit quoi.
Ce logiciel est introduit dans une classe, on demande aux élèves d’écrire un texte à plusieurs. Des dynamiques d’écriture se mettent en place, on observe notamment que des élèves écrivant peu d’habitude s’y mettent plus volontiers avec cet outil. Par ailleurs, l’outil permet de sensibiliser les élèves à des œuvres littéraires numériques.
Victor Petit travaille actuellement sur un module intitulé « L’écriture des traces ».
Autour de la trame du rêve, la graphiste Maria Fischer compose et tisse un livre aux références variées, empruntant à la littérature, à la psychologie, à la philosophie et aux sciences. En s'inspirant de l'hyperlien numérique, elle relie mots-clés et contenus par des fils de couleur dont la confusion et la fragilité viennent souligner le mystère et l'évanescence des rêves.
Au-delà de l'intention de l'artiste et de son interprétation graphique du monde des rêves, ce livre incarne l'hyperlien dans le papier et nous en donne une lecture analogique, révélant en creux la complexité et la fragmentation de la lecture hypertextuelle.
Marshall McLuhan, théoricien canadien des médias – Understanding media, 1964
« Nous donnons forme à nos outils, après quoi ce sont eux qui nous donnent forme » : les neurosciences confirment aujourd’hui cette affirmation.
Dans cette intervention, Bruno Harlé questionne les liens qu'entretiennent les processus cognitifs et les nouvelles technologies : qu’est-ce que les nouvelles technologies étendent ou rendent obsolètes dans les domaines de la lecture-écriture, de l’attention, du raisonnement et des apprentissages ? Ces différentes entrées révèlent :
Référence : Neil Postman, Se distraire à en mourir – « La télévision enseigne le mieux à regarder la télévision. »
Exemple du jeu Nintendo « professeur Kawashima » : du point de vue cognitif, il est prouvé que le jeu est à peu près équivalent au jeu papier-crayon de Pif Gadget.
De nombreuses études montrent que la présence d’un ordinateur à la maison a tendance à détériorer les performances scolaires (au point que certains établissements aux États-Unis ont abandonné leur programme d’éducation par le numérique) – a contrario, l’implication des parents dans l’accompagnement scolaire des enfants a un effet positif sur leur performance, indépendamment du niveau des parents.
Marshall McLuhan : « C’est le moment d’étudier les nouveaux médias et leurs effets. Quand ils seront omniprésents, ce sera plus difficile. [...] Nous ne savons pas qui a découvert l’eau, mais nous savons que ce n’était pas un poisson. »